16 septembre 2014

Auckland - On commence à s'y faire

Le WiFi est daubé du cul.
Après 15 tentatives, enjoy le gros pavé.


• Jour 4
Mardi 16 septembre

J'ai pas dormi de la nuit.

Je me suis endormie à 19h, ce qui est assez tard par rapport à d'habitude depuis mon arrivée ici, dans une confiance que je n'avais pas eue depuis mon départ. La réunion de ce matin, à l'agence Work n Holiday, y a grandement contribué. Mais, une angoisse en chassant une autre, une gigantesque crise de panique m'a saisie aux tripes à 2h, et je ne me suis pour ainsi dire pas rendormie. J'en ai pas été loin, une fois, mais pareil, je me suis réveillée en étouffant. Mon cerveau fonctionne à mille à l'heure, émet plein d'hypothèses avant même que j'ai le temps de les empêcher de se former et, à la fin, je me retrouve submergée par toutes ces possibilités si floues, ponctuées de "et si... ?" Et si ça marche pas ? Et si je ne trouve pas de travail ? Et si je trouve un travail cool mais pas de colocation ? Et si je suis obligée de vivre des mois en auberge de jeunesse ?


À toutes ces questions, mon moi réveillé du milieu de journée répond "et alors, on s'en fout, y a plein d'autres solutions ! Si tu trouves pas de job, tu vas au pair, ou tu fais du WWOOFing, tu gagneras pas de sous mais tu te ruineras pas non plus. Et au pire, t'as assez de sous de côté pour tenir plus de trois mois dans ton auberge de jeunesse actuelle, en mangeant à ta faim et en visitant les alentours."

Sauf que mon moi qui s'endort et qui abaisse ses barrières mentales flippe. Le WWOOFing, j'ai pas envie, et c'est pas pour plusieurs mois, et je serai loin de tout alors que je veux rencontrer du monde, je veux gagner des sous pour être sûre de ne manquer de rien (grosse névrose chez moi, je sais pas pourquoi)(oui dites-le : je suis radine), j'ai pas envie de passer deux ans d'économies en deux mois juste pour me loger alors qu'il y a tant de choses à voir.
Et, par-dessus tout, j'ai envie d'avoir un endroit à moi où je peux laisser exploser ma valise tranquillement sans que de nouveaux inconnus arrivent dans mon dortoir chaque jour. J'ai envie de me poser, même pour quelques mois, avec des gens avec qui je peux tisser des liens. Des colocs, des collègues. J'ai envie de découvrir le mode de vie néo-zélandais à travers une vie normale qui ne sonne pas trop backpacker.

J'ai toujours mal aux reins. Mais je crois que ça s'améliore. Je bois comme un trou, je passe ma vie à courir aux toilettes, mais ça va mieux. Quoi ça vous intéresse pas. Vous-mêmes. J'ai dit que je ne cacherai rien de mon expérience, alors je ne cache rien. J'ai envie de garder une trace de ce que je vis ici, de comment je le vis. Et si ça peut servir à certains futurs PVTistes, alors go for it.
De tout ce que j'ai pu lire, rien n'est comparable à ce que je suis en train de traverser. Normal vous me direz, c'est un truc un peu personnel. Mais quand même. Soit les gens sont bien moins prise de tête que moi (ce qui ne m'étonnerait pas), soit ils ont minimisé l'impact du dépaysement pour ne pas effrayer les gens qui voudraient faire pareil.
Je suis terrifiée. Et mes roommates sont terrifiées aussi. Xiao Rin est partie aujourd'hui. Comme elle n'a trouvé ni job ni rien du tout, elle a échoué chez une amie à elle qui étudie à Auckland. Ni Stefanie ni moi n'avons la chance d'avoir des connaissances dans le coin. Nous sommes seules pour de vrai.

Bon, en fait je ne suis qu'à moitié seule, Work n Holiday est là. J'avais pensé qu'avec la réunion d'hier et celle à venir cet après-midi, mon angoisse me ficherait la paix cinq minutes. C'était sous-estimer ma capacité à me faire des films.

Tellement de choses me passent par la tête.
La certitude que je n'ai pas les épaules pour ça, que je ne m'y suis pas assez préparée, suivie de la certitude que personne n'a les épaules ni la préparation nécessaires avant de vraiment le vivre et savoir ce que c'est. C'est un peu Darwin : tout le monde peut venir ici, et à chacun de se forger ses propres épaules pour survivre au début. Ou craquer et rentrer chez soi.

Je peux rentrer chez moi n'importe quand. Sauf que je ne le ferai pas. 
Pas avant cinq mois minimum. Je m'y refuse. La Nouvelle-Zélande est mon rêve depuis plus de deux ans, j'ai travaillé dur pour y arriver, alors je ne vais certainement pas baisser les bras quatre jours à peine après mon arrivée. Si je n'étais pas préparée à l'impact du changement, je suis prête à prendre n'importe quel job. Même si ça implique de retomber dans le service, ou de récurer des chiottes. Je ne me laisserai pas submerger par toutes ces craintes. 

Alors en me levant, ce matin, à 6h40, je suis allée me doucher. Et j'ai pleuré.
Beaucoup. J'ai pas eu besoin de beaucoup d'aide, en fait j'avais simplement "Ne retiens pas tes larmes" d'Amel Bent (SHHHHH, moi aussi j'ai honte) qui tournait en boucle dans ma tête. J'ai pas retenu. J'ai tout laissé sortir. J'étais même pas spécialement triste, mais c'est le seul moyen efficace que j'ai trouvé pour évacuer la pression. 
Je pleure rarement à chaudes larmes. Je chougne très souvent, par contre. Quand je suis en colère, émue ou whatever, devant un épisode de Grey's anatomy par exemple, y a presque systématiquement une petite larme qui coule. Pas ma faute, c'est directement relié à mes nerfs et j'ai beau m'entraîner, je le contrôle pas. Bref, et donc là, j'ai juste éclaté en gros sanglots pourris, du type qui te laissent le nez rouge et coulant. J'ai tout évacué, et je suis sortie de la douche plus calme, vidée... et j'ai skypé mes parents.


Je ne dirai pas que j'ai honte de déjà les appeler alors que je ne suis même pas partie depuis une semaine. Mais avoir un besoin si urgent de leur parler m'a fait me sentir comme un gros bébé qui veut sa manman même si, avec le recul, je me rends compte que c'est exactement à cause de ça que je suis partie loin : m'obliger à ne plus compter sur mes parents et à me débrouiller seule pour de vrai. Bon, je le faisais déjà, mais leur présence à côté me rassurait et m'aidait beaucoup. Alors que je pleurais comme une gamine, devant mon écran, en plein milieu du lobby, ça m'a confortée dans ma décision de partir pour couper ce cordon indestructible.

Leur parler m'a fait un bien fou.
On a beau dire, les parents sont la voie de la raison. Ils savent comment te sortir de ta spirale de panique et remettre les choses dans leur cadre. Oui, je vais trouver un boulot. Oui, ça va sans doute prendre un peu de temps. Non, c'est pas grave. T'as un toit pour les deux prochaines semaines et tu peux prolonger encore, au pire. Tu es fatiguée, pas encore remise du décalage horaire. Pense à ta santé d'abord. Chaque chose en son temps. D'abord, te remettre d'aplomb. Ensuite, chercher un boulot en terminant tes papiers. Visiter un peu, tant qu'à faire. Et si dans deux semaines tu n'as rien, donne-toi deux autres semaines.

Et, alors que je leur parlais, j'ai eu deux grosses révélations.

La première, c'est qu'être au pair ne me dérangerait pas plus que ça. Faire du WWOOFING non plus. Et c'est facile à trouver, alors tant pis si je ne peux suivre le cadre que je m'étais fixé (à savoir : trouver un job sur Auckland pour trois, quatre mois).

La seconde, c'est que je ne resterai pas aussi longtemps que prévu en Nouvelle-Zélande. 
Je comptais y rester neuf, dix mois, et finalement ça s'approchera plus des sept. Un mois pour trouver du travail et commencer, poursuivre ce travail jusqu'à la mi-janvier ou fin janvier. Deux semaines pour partir un coup en Australie (ou trois, selon les finances), peut-être une semaine aux Fiji (soyons fous, j'aurais pas d'autre occasion). Et, mi-février, tout lâcher et partir en road-trip autour de la Nouvelle-Zélande, avec le Chaboudin qui va m'y rejoindre exprès (cadeau des 20 ans, un tiers du billet d'avion. Sympa la sœur, hein ?) pour un mois minimum. 
Et rentrer ensemble début avril.

À dire vrai, et après y avoir bien réfléchi et en avoir discuté avec mes roommates et les gens de l'agence, je ne vois pas l'intérêt de rester plus longtemps en Nouvelle-Zélande, une fois que j'aurais vu tout ce que j'aurais à voir. Mon but, à l'origine, est de découvrir un nouveau mode de vie (ce que je vais faire les quatre premiers mois), et surtout de découvrir le pays. Une fois que j'aurais tout fait, je ne me vois pas tenter de retrouver un travail, alors qu'il n'aura plus rien à financer derrière. Après tout, dans la description du WHV par le gouvernement néo-zélandais, ça dit clairement qu'on est là d'abord pour voyager, et travailler pour se payer le voyage.

Ça serait le scénario idéal. 
Dans la pratique, ça risque d'être un peu plus tendu, parce que si je me retrouve au pair ou en WWOOFing, gagner des sous sera un peu compromis. Au pire, on fera un croix sur les Fiji et sur certaines destinations de l'île sud, hein. Ou alors j'irai faire quelques jours de fruit picking histoire de pouvoir payer l'hôtel. Haha. 

Bref. Même si ça ne se passe pas comme ça, je me suis recadrée. Je sais où je veux aller, à défaut de savoir où je vais vraiment.
Et rien que ça, avoir un but, c'est déjà beaucoup.


J'ai passé le reste de la matinée à discuter avec Stefanie. Et j'ai eu la surprise de la voir pleurer, elle aussi, alors qu'elle paraissait tellement relax hier. On parle d'une meuf qui a déjà fait un WHV en Australie quand elle avait tout juste 18 ans et qui part tous les ans dans le Wisconsin faire des camps d'été. Qui est Écossaise. Donc qui a l'habitude de partir loin et seule.
En fait, elle est aussi perdue et angoissée que moi. Ça fait du bien de réaliser qu'on est tous dans le même bateau, même avec différentes expériences derrière nous. On partagera nos ulcères, rhârhâ.

Demain, je change d'auberge de jeunesse. J'ai finalement trouvé un nouveau toit en la présence de Silverfern backpackers, à deux rues de là où je me trouve, pour deux semaines. Pour la modique somme de 348 NZD, soit environ 220 €, j'ai pu avoir accès à un dortoir non mixte de 6 personnes. J'aurais qu'un giga d'internet par SEMAINE.
Les kiwis sont vraiment des gros radins du WiFi. 


La réunion de cet après-midi chez Work n Holiday ne m'a rien appris de nouveau. Je sais déjà comment chercher correctement un boulot, question d'habitude de galérien du CDD. Si ce n'est qu'il faut en moyenne trois semaines pour trouver quelque chose, ici. Ça me paraît énorme. 
Mais ainsi soit-il.

En fait, si, ça m'a appris une chose, un peu genre révélation : je considère avec davantage d'intérêt l'option du pair. Mais si j'aime les enfants, allons, je suis faite pour ça. Je leur apprendrai à dessiner, peindre, se battre à l'arme blanche, faire des batailles de nourriture, ça sera fun.
Ça me paraît la meilleure alternative, si je ne trouve pas de travail rapidement. M'occuper des enfants, être dans une famille de kiwis, passer Noël en famille, avoir deux jours de libre et un peu d'argent de poche. Argent de poche qui équivaudrait, selon mes calculs, à ce que je pourrais économiser si je travaillais à temps plein, un peu au-dessus du salaire minimum, avec un loyer et de la nourriture à payer. 
Alors why not.


Bref. On verra bien.
Au moins je vais bien dormir, ce soir.
Dites-donc, il est 22h, j'ai explosé (explosey) mon record ce soir ! Je crois bien que je l'ai enfin niqué, ce jet lag !
(Si mes nouvelles roommates chinoises pouvaient avoir la décence d'éteindre leur putain de lumière AVANT de s'endormir et pas demain matin, ça serait parfait.)



• Fun facts :
Toute la journée, la Nouvelle-Zélande a hm... tenu à me réconforter.

Premier signe : la musique de la vidéo promotionnelle de Stray.
C'est la même que celle utilisée par mes managers, cet été, pour la vidéo souvenir du staff. Et c'est loin d'être une musique connue.
Stray, c'est une compagnie de bus qui a des offres de pass hop-on hop-off plutôt méga intéressantes dont je compte profiter (mais je reviendrai sur cette compagnie géniale dans les jours à venir). 








Second signe absolument incroyable : la tronche de la pièce de 50 cts. Celle-là, c'est définitivement le destin qui me l'a amenée, j'en ai d'office fait mon porte bonheur.
Quelles étaient les chances pour que ça arrive, sérieux ?

















Troisième signe unbelievable : parmi les réseaux WiFi qu'on capte à l'agence...



<< Y A RIEN QUI VOUS CHOQUE ? (pour ceux qui me connaissent pas, Luka est le nom de l'héroïne de mon roman. Elle navigue sur l'Endeavour, ahahem)
















Quatrième signe : au petit-déjeuner ce matin, un Allemand au téléphone répétait en boucle "genau". Manquait plus qu'un petit "posey" et "aights" et on était bon.

Cinquième signe : j'ai craqué. Je voulais attendre, mais elle me faisait de l'œil.


Elle est trop belle, hein ? Y a même le nom maori de la Nouvelle-Zélande,
qui signifie "le pays du long nuage blanc".





4 commentaires:

  1. PTIN tu m'as dit pour les Fiji sur fb et j'étais tellement préoccupée par mes petits problèmes que j'ai même pas pensé à faire une blague sur Carrie ou quoi.
    Bref. Du coup. Faut que t'ailles aux Fiji, un bisou à Dave, et attention aux cadavres dans les lingeries, ha. ha. ha.
    Et re-love dans ta face.

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  2. aaaah j'adore la pièce de 50cts et la connection wifi !
    sinon courage ma poulette ! tu es forte et pleine de ressources. ça ne fait que 4 jours, et c'est dur de se retourver loin, seul et dépaysé mais ça va aller, j'ai confiance en toi, tu vas t'éclater !
    plein de poutoux !

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  3. Tiphs :)
    Olala je suis toute avec toi dans cette aventure ! Bats-toi, montre leur que la Frenchie est la meilleure et ne baisse pas les bras !
    J'espère que ton problème de santé s'est amélioré parce que c'est quand même légèrement gênant ^^'
    Les signes sont trop ... OH.MY.FUCKING.GOD *_* Surtout la pièce et le réseau wifi, c'est totalement pour toi !
    Allez, courage, ce n'est que les 4 premiers jours !
    Pluie de bisous de réconfort, de bonheur et de folie !
    (Calypso)

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  4. Hahaha la pièce et la connexion, c'est génial !!
    C'est bien que tu positives et que tu vois un peu de lumière au fond de ce tunnel ! J'ose même pas imaginer ce que tu vis en ce moment, ça doit être hyper intense et stressant ! Je compatis, déjà que pour quitter ma région et aller vivre plus ou moins définitivement à 6h de route de ma manman je stresse, alors l'autre bout de la planète, c'est même pas la peine !!

    Courage, ça fait que quatre jours, faut pas baisser les bras c'est que le début ! (c'est le moment où tu ricanes et balances une assiette à travers la pièce parce que ces mots-là tu les as entendus quatre mille fois et ils t'aideront pas à avancer et à moins stresser. Mais ils sont pas moins vrais !)
    En tout cas, je vais suivre ton périple avec attention ! =)

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