16 septembre 2014

Auckland, premières impressions

• Jour 1
Samedi 13 septembre

Auckland est une ville bizarre.

Il y a d'un côté l'émerveillement, quand le hublot dévoile les premières parcelles de terres vallonnées de l'île nord, toutes verdoyantes et déjà tellement Middle-earth, qui te murmurent "tout va bien se passer, tu verras" ; l'entrée dans l'aéroport, où les gens te demandent comment tu vas, d'où tu viens et espèrent que tu te plairas dans leur beau pays ; cette espèce de porte maori absolument incroyable ; ce monsieur dans la navette qui t'assure qu'avec un anglais excellent comme le tien, et vu la période, le boulot, ça sera easy à trouver (tankiou verimuche seur) ; le Starbucks à 3€ le Tall ; les cris des mouettes qui résonnent dans les rues ; le Skycenter, qui symbolise à lui seul toutes ces heures passées à rêver la Nouvelle-Zélande ; l'accent chatoyant qui transforme "ten" en "tin" et "day" en "die" ; les roommates chinoises trop chou qui te proposent d'emblée de les accompagner au musée ; les silhouettes de vieux volcans éteints qui se dessinent là où on ne les attend pas ; toutes ces perspectives que tu entraperçois furtivement avant de laisser la place à d'autres.


La porte en question


De l'autre, il y a les contrôles douaniers incroyablement relous, les menaces d'amende en grosses lettres noires sur fond jaune, répétées tous les dix mètres, si tu importes de la nourriture, des affaires de rando ou des médicaments, parce qu'on plaisante pas avec les microbes qui pourraient exterminer leurs espèces endémiques ; ce temps qui change à plus grande vitesse que celui d'Islande et qui te fait rentrer trempée parce que, 1h avant, il faisait grand beau alors la veste, walou ; cette ribambelle ininterrompue de restos coréens/japonais/chinois/viêtnamiens qui se déroule tout le long de Queen Street sans laisser la place à un magasin normal parce que j'ai oublié ma brosse à dents ; l'ambiance polaire de l'auberge de jeunesse, où on t'ignore complètement malgré tes bonjours et tes sourires (alors qu'ailleurs, c'est plutôt chaleureux) et où les mecs de la réception sont blasés de tout ; cette impression de ne pas être à ta place dans la rue quand tu marches ; la radinerie du wifi, qu'il faut systématiquement payer si on veut se connecter plus de trente minutes ; l'atmosphère un peu je-sais-pas-trop-si-je-le-sens-en-fait qui se dégage du centre ville qui te fait te souvenir qu'à la base, les villes c'est pas ton kiff ; tous les jeunes de l'auberge qui ont l'air de galérer pour trouver de quoi bosser et se loger... qu'est-ce que je fous là.




• Jour 2
Dimanche 14 septembre

Je pisse du sang.

Et non ce n'est pas une façon de parler. Je pisse vraiment du sang, c'est orange là-dedans, j'ai mal aux reins. Bien sûr, tu m'étonnes, 30h de vol en avion avec la fatigue et le stress qui l'accompagnent, ça devait arriver. Comme d'habitude. Je supporte pas 5h de train, pourquoi je supporterai 30h d'avion. Pfrt, fuck off les reins, vous me chiez dans les bottes, voilà.
J'espère juste que c'est temporaire. J'ai pas envie de commencer mon séjour par une semaine à l'hôpital, alors je bois de l'eau. Beaucoup d'eau. Dans des bouteilles dont le plastique a été fabriqué à partir de plantes, because "at Charlie's, we care about our planet".
Sounds good.

Je me suis endormie à 17h, après avoir lutté le plus possible contre le sommeil dans l'espoir de me caler rapidement. Ça a marché, je me suis réveillée à 8h ce matin. Pas mal, hein, la nuit de 15h ? Mes roommates, qui sont en fait une Chinoise (Xiao Rin), une Coréenne (May) et une Écossaise (Stefanie) m'ont proposé de les accompagner au musée d'Auckland, qu'elles n'avaient pas fini de visiter la veille. Dans ma tête, j'ai répondu que les musées c'est pas mon kiff, que de toute façon je suis crevée j'ai mal aux reins laissez-moi je veux me morfondre sur mon malheur.
En vrai, j'ai accepté avec plaisir, parce que je me sens perdue, seule, qu'on est dimanche et qu'il pleut. Go for the museum, then.

Et en fait, il était vraiment chouette. Après vingt bonnes minutes de marche dans les rues vallonnées d'Auckland, être passées dans un charmant parc aux allures de forêt tropicale et s'être pris la pluie sur la gueule (étonnant), on a pu admirer l'art et l'histoire maori, monter au deuxième étage voir la faune et la flore (avec des kiwis empaillés tous les trois mètres)(et des weta aussi, quelle horreur), la géologie aussi avec touuuut un espace amazing réservé aux volcans (y a même un simulateur "et si soudain un volcan entrait en éruption dans l'eau entre Auckland et Rangitoto ?")(qui finit par une grosse pub "achetez ce livre pour savoir quoi faire en cas d'éruption inopinée")


Le weta. Coucou.

Je disais quoi ?
Ah oui. Le deuxième étage. Je l'ai surkiffé. Le troisième était aussi super intéressant, consacré exclusivement à la guerre. Guerres mondiales, guerres territoriales, les maoris qui adoraient se foutre sur la gueule, tout ça. Cool, mais on a fini par écourter, déjà parce qu'on avait faim, ensuite parce qu'on était franchement crevées et qu'il fallait se taper les montées-descentes en sens inverse. Et puis j'ai eu vraiment peur, à ce moment précis, de faire une colique néphrétique. À mon avis, j'en étais pas loin du tout, j'en ressentais tous les prémices.
Au retour, on est passé par le Lover's path, un chemin qui s'enfonce dans une petite forêt tropicale puissance mille, avec des silverferns partout, c'était magique. Et non, pas de photo, je luttais pour ma survie rénale. Et devinez quoi ? il pleuvait.

Et là, pas moyen de lutter, je suis tombée à 16h20. J'ai même failli louper l'anniversaire de ma copine Ienny. Jet lag de merde.



• Jour 3

Lundi 15 septembre

Mais qu'est-ce que je fous là ?

La question tourne en boucle dans ma tête depuis que je me suis réveillée comme une fleur à 3h40. Je n'aime pas trop la ville, je suis toujours perdue, toujours seule et, comme j'ai eu la bonne idée de regarder les sites de PVTistes et autres blogs avant de dormir, mon angoisse a augmenté d'un cran. Je n'arriverai jamais à faire toutes les démarches toute seule.
On m'a souvent répété que j'étais courageuse d'oser partir seule comme ça aussi longtemps. En fait, je ne suis pas courageuse. Je suis inconsciente. Je n'ai pas ce qu'il faut pour réussir. Je n'y arriverai pas. Je veux rentrer chez moi. J'ai envie de vomir. Et j'ai mal aux reins.

J'ai sauté du lit à 7h, après m'être miraculeusement rendormie, pour me préparer pour mon rendez-vous chez Work N Holiday. Depuis mon arrivée, je me répète qu'il ne sert à rien de paniquer tant que je n'y suis pas allée, que ça va bien se passer...
Je suis arrivée dans les bureaux, au dixième étage d'un building en plein centre ville, et y a eu, je sais pas, un déclic. Ça respirait tellement la sérénité, le calme, la confiance... J'ai été accueillie par Marine, une Belge qui, comme moi, est en Working Holiday Visa (et a eu la chance du siècle en trouvant un job dans cette agence).

Et la lumière fut.
Aucun problème pour ouvrir un compte bancaire, puisque mon pack Job Assistance (ouais je suis pas partie trop seule non plus hein, mais avec Languages and Travel) prend tout en charge. En outre, j'ai déjà une adresse de résidence : celle des bureaux. Non, je ne vais pas y planter ma tente (de toute façon j'en ai pas), mais pour la banque, c'est l'info manquante pour me permettre d'ouvrir un compte. D'ailleurs, eh, il est déjà pré-ouvert, ton compte. T'as plus qu'à aller à la banque après la réunion pour signer des papiers et obtenir ta carte.
BORDEL, je respire. Pour ce qui est du numéro IRD, il faudra attendre mercredi matin pour faire les démarches. Il me manque mon permis de conduire international, ce qui signifie que je dois prendre rendez-vous directement aux bureaux.
Suite à ça, on a beaucoup parlé. Pendant deux heures et demie, en fait. Que voir en Nouvelle-Zélande (réponse : absolument tout), comment le faire sans se ruiner, acheter une voiture, le problème du Soleil (coucou on est sous le trou de la couche d'ozone, sans protection t'es brûlé au 2° degré en 7 minutes, trop cool). Ça met du baume au cœur, ça remotive, et ça va mieux. J'envisage même d'enfin faire une vraie visite du centre ville mais non, toujours jetlaguée et souffrante, ça attendra.

Je vais pas m'éterniser sur le détour à la banque. La Japonaise qui s'est occupée de moi était over-sympa, tout a été réglé en une demi-heure, j'ai pu envoyer mes détails de compte à mes parents pour qu'ils m'envoient le reste de mon argent.
J'ai bien essayé, avec cet optimisme renaissant, de manger un bout. Peine perdue, j'ai pas fini mon menu au Mac Do. Bon. Pas grave, j'ai toujours la gerbe et l'appétit coupé quand il y a un grand changement dans ma vie.
En l'occurrence, celui-ci est le plus grand qui me soit jamais arrivé.


Je me sens mieux, mais un nouveau problème se pose : 
dans deux jours, j'ai plus nulle part où dormir.




Le saviez-vous ?

• Auckland est construite sur un champ de volcans éteints. J'ai lu 49 quelque part. Du coup, quand je dis que c'est vallonné, c'est vallonné pour de vrai. J'en pouvais plus de la vie.
• L'eau est en supplément, ici, dans les menus du Burger King et du Mac Do. Dis donc, bâtards.
• Les silverferns, en fait, c'est l'emblème de la Nouvelle-Zélande. Avec les kiwi, les maoris et tout. On la retrouve partout, sur le maillot des All-Blacks, sur le passeport Néo-zélandais... En fait c'est une fougère qui pousse en masse, verte dessus, argentée dessous. C'est banal, mais c'est beau, et ça revêt un petit côté magique parce que c'est l'emblème national.


2 commentaires:

  1. Oh là là, chapeau ! Allez Tiphs courage, tu vas voir dans un mois quand tu te seras acclimatée, que tu auras trouvé toit et job, tu seras tellement contente et fière de toi que tout ceci ne sera qu'un lointain souvenir ! Je te le souhaite en tout cas^^
    As-tu pensé au CouchSurfing, je ne l'ai pas encore pratiqué mais j'y songe pour mon prochain vagabondage ;) Cela pourrait être une bonne alternative en attendant de te trouver un toit stable, il te permettrait de dormir "gratuitement", de rencontrer des gens de là-bas qui pourraient t'en apprendre plus, te faire découvrir les petits coins sympas où les touristes ne mettent jamais les pieds etc, en échange tu peux leur faire découvrir notre cuisine française et si tu n'aimes pas ça, entre tes donc de dessinatrice et d'auteure je suis sûre que tu peux leur faire plaisir à ta manière! Mais je comprends que ce mode d'hébergement puisse effrayer.... Sinon il y a AirBnB qui est bien, mais payant, mais là encore c'est pratique, et tu peux vivre ta vie à côté...
    Bonne chance
    Julia

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